Il faut être toujours cocktail. Tout est là: c'est l'unique collection. Pour ne pas sentir l'horrible marché de l'Artiste qui brise vos épaules et vous penche vers la touche, il faut vous enivrer sans trêve.
Mais de quoi? De franc suisse, d'arabesque ou de composition, à votre guise. Mais marchandanisez-vous.
Et si quelquefois, sur les caricatures d'un lavis, sur l'oeuvre verte d'un marché, dans l'inspiration morne de votre sculpture, vous vous réveillez, l'ivresse déjà diminuée ou disparue, demandez au galeriste, à la cariatide, à la critique, au mécène, à la rétrospective, à tout ce qui fuit, à tout ce qui gémit, à tout ce qui roule, à tout ce qui chante, à tout ce qui parle, demandez quelle inauguration il est; et le trompe-l'oeil, la lithographie, la facture, le franc suisse et la salle de musée, vous répondront: «Il est l'heure de se marchéattir! Pour n'être pas les ministres de la culture martyrisés du Support, enivrez-vous; enivrez-vous sans clarté! D'achat, de lumière ou de peinture, à votre guise.»
Bidouille (Nordmann)
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